Swarm : une métaphore horrifique du phénomène « Beyoncé »(analyse)

L’allégorie de l’enchantement Beyoncé

Andrea

Mais certains phénomènes reviennent bel et bien, ne serait- ce que sur les réseaux sociaux : la virulence de la défense de ses fans, son super statut d’idole, comment le monde virtuel s’arrête ou au contraire s’agite, lorsque que l’artiste fait le moindre geste. Mais la réelle question est celle-ci : qui est réellement à blâmer, l’artiste ou les fans ? Ces dernières années, de nombreux artistes ont fait polémique quant aux déchaînements qu’ils provoquent partout où ils passent, Travis Scott le premier et pourtant malgré la terrible polémique Astroworld, son énorme scandale a vite été oublié. La série se moque aussi de ce que les réseaux sociaux véhiculent : des avis et opinions creux mais aussi provocants et ironiques, d’individus voulant surtout attirer l’attention. Le danger est de leur donner une importance trop réelle, même s’ils peuvent l’être.

Le cas Beyoncé fait fantasmer les médias, les personnes très croyantes car elle frôle de près leur stature et celles des divinités: elle est érigée autant qu’eux. De manière subjective, elle semble presque avoir tous tous les talents possibles, faisant d’elle une artiste presque invincible et complète, sur le papier.

Le génie de l’épisode 6 : les femmes noires et le genre horrifique 

Ces dernières années, de multiples productions et films ont mis en avant des femmes noires dans des rôles horrifiques, en tant que criminelles. Ce n’est pas une représentation dont on devrait se réjouir dans l’absolu, mais c’est pourtant réaliste et ce genre de rôles est essentiel afin de dissoudre ces clichés et cases où sont souvent enfermées les femmes noires. Oui et malheureusement elles sont capables de crimes horribles et autres actes déviants. Ce n’est pas une fierté mais une réalité et quelque part Swarm vient rappeler cette normalité anormale. Des films comme Saint Omer d’Alice Diop (2022), viennent aussi casser cette image de la femme noire ou d’origine africaine monolithique, incapable de commettre l’inimaginable, hermétique aux maladies mentales et à qui on accole des attentes comportementales très hautes. Cet épisode est un easter egg qui s’éloigne clairement par son côté documentaire et surtout policier.

L’épisode nous plonge dans l’exosquelette des crimes d’Andrea, son enfance et ce qui pourrait expliquer sa grande déviance criminelle. Sur le ton de l’humour, l’enquêtrice Lorette Greene, cherche et démontre lors d’entretiens de proches et témoins, les similitudes des crimes, qui se succèdent presque aléatoirement depuis des années, sans que cela ne dérange vraiment. C’est d’ailleurs un point stupéfiant de la série, malgré le fait qu’Andrea tue de façon impulsive, qu’elle commette des meurtres qui matérialisent ce point de non retour, des passages à l’acte activés par sa fascination morbide, à l’image de ses rencontres décevantes, toutes aussi événementielles, personne n’a relevé les nombreuses disparitions, souvent dans la même ville. Pour ne pas extrapoler le côté socio-spatial de la chose mais la série, comme Atlanta (2016-2022), sa grande sœur, met en lumière une réalité concrète de certains milieux ruraux ou moins urbains : un abandon sociétal parfois économique mais aussi institutionnel. Des aires où les portés disparus ou autres cas criminels deviennent parfois des légendes ou histoires orales s’inscrivant dans l’imaginaire collectif et le fait divers jusqu’à l’oubli. D’autre part, on sent l’importante touche « féminine » voire féministe dans la série, provenant sûrement d’une grande partie des productrices, avec des personnages femmes qui s’affirment et aux personnalités singulières

Les hommages et clins d’œil visuels et cinématographiques 

La série s’inscrit dans le genre du « black horror », en y faisant des clins d’œil à des films jeunes mais déjà cultes comme Get Out (2017) ou tout simplement à la série Atlanta, qu’on peut qualifier de grande sœur de Swarm. Donald Glover étant le producteur et créateur des deux séries, on ressent indéniablement sa touche si particulière. L’énergie ambiante insaisissable, entre bizarrerie et une lenteur latente parsemée par de l’absurde et une menace presque omniprésente. Le superbe épisode avec l’artiste Billie Ellish dans un rôle de gourou, rendait objectivement hommage à Get Out ou encore Midsommar (2019). On retrouve des scènes similaires, comme la déjà mythique scène de la tasse de thé dans Get Out, qui résonne avec la dure et intense scène thérapeutique, rythmée par des claquements de doigts, dans Swarm. Un autre leitmotiv se redessine à nouveau : une femme noire/ personne noire, initialement socialement fragilisée et esseulée, se retrouvant dans un endroit majoritairement blanc et aisé et où se trouve un collectif atypique, voire une secte, manipulée et piégée à des fins sacrificielles ou morbides. Et elle est rarement maîtresse de son sort, un véritable cauchemar en somme.

Il semble aussi que le cinéaste tient à montrer les états du Sud des États Unis sous un autre aspect, en les éloignant de leur caricaturale carte postale naturelle, chaude et culturellement dense. Ces états sont avant tout porteurs d’une histoire qu’on connaît malheureusement tous : l’esclavage, la traite négrière et tous les actes de tortures et d’inhumanité qu’on découvre de plus en plus au fil des années. Comme un écho à ce passé sombre mais tout aussi actuel du pays américain, les productions de Donald Glover sont souvent visuellement très intéressantes et esthétiques, à la saturation poussée, des images belles qui contrastent souvent avec la brutalité et la dangerosité des situations démontrées. 

Swarm dramatise et parodie au travers de l’horreur, cette hérésie populaire que peut être la starification, un phénomène social moyennement récent mais exacerbé par les réseaux et plateformes socionumériques. Virtuellement, les égos et fantasmes se rencontrent mais surtout des personnes lambdas expriment simplement ou fortement leur appréciation pour un.e. artiste et son art. L’intensité change selon l’individu, la sphère et les époques !

Lunaticharlie

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