Le dimanche 26 janvier dernier, la maison française Jacquemus, présentait sa nouvelle collection automne-hiver 2025-2026 « La Croisière ». Le défilé se tenait dans l’appartement parisien de l’architecte Auguste Perret. Dans cette ambiance boisée et classieuse, on remarque que l’aura du défilé est plus que discrète. On y voit des nouveaux visages adulés des nouvelles générations, tels que ceux de la chanteuse britannique Raye ou encore de la sud-africaine Tyla. Sans oublier la présence de la dernière étoile montante de la pop « urbaine » française, Théodora. Jacquemus souvent précurseur dans l’industrie de la mode depuis près de 10 ans maintenant, tient à maintenir sa réputation de maison à l’écoute des nouvelles générations et des changements des industries culturelles internationales. Mais il y a une chose qu’on retient de son dernier défilé : le tournage du défilé via l’Iphone.



C’est une innovation pour la mode, dont les défilés sont littéralement devenus des spectacles à part entière. Plus hauts, plus grands, plus loins, les défilés des grandes maisons sont de moins en moins focalisés sur les pièces et les vêtements. Les lieux, les décors et surtout les invités sont aujourd’hui tout aussi importants parfois plus que l’aspect couture et artisanale. À vrai dire, ils l’ont toujours été mais aujourd’hui encore plus. En filmant son dernier défilé à l’Iphone, la maison Jacquemus vient hijacker le regard des invités sur place, en montrant que la maison de couture peut elle aussi se filmer. Et quelque part, se réapproprier son identité et son historicité visuelle. On dépasse le problème du FOMO et du voyeurisme orchestré derrière la captation de l’instantanéité, en dévoilant un défilé sur les réseaux sociaux, le défilé à peine finit. Les angles sont distants, étranges à l’image des mains qui de base les possèdent. Ce choix de la maison Jacquemus est d’autant plus surprenant car on connaît les défilés et productions spectaculaires qu’elle présente depuis des années et depuis sa création. On observe un parti pris de Jacquemus de se rendre moins accessible, privé mais pas secret. Les lieux des derniers défilés le démontrent aussi : du défilé anniversaire à la Villa Malaparte (Italie) en juin 2024 au défilé printemps-été 2024, au sein de la Fondation Maeght, dans les Alpes-Maritimes. Les défilés de la maison sont de plus en plus sélectifs, sobrement criants mais visuellement restreints, clos mais restant visibles par leur éclat et répercussion notamment virtuelle. Le choix de l’appartement Auguste Perret n’est pas anodin. C’est la matérialisation d’un entre-soi affirmé. Et c’est aussi un clin d’oeil aux défilés d’antan en « appartements », composés de personnes de hautes sphères sociales et culturelles. Des défilés où la mode et la théâtralité s’unifiaient et où le jeu social prônait. La maison Jacquemus est mobile et absorbe l’essence de bâtisses et lieux artistiques, peu connus du grand public.


La captation à l’Iphone est premièrement un coup marketing intéressant, simple mais efficace. Mais sur le plan culturel, c’est une gifle mise aux réseaux sociaux et à la culture du « tout filmer », présente dans nos vies au quotidien. C’est aussi quelque part un pas en avant vers des défilés de plus en plus robotisés et portés vers les nouvelles technologies. Totalement vectrices des transformations socio-culturelles et matérielles, la mode et les maisons de luxe peuvent quelque part servir de miroirs sociétaux. On peut ici citer les maisons Loewe et Copernic, dont les collections, notamment celles du printemps-été 2023, ont caressé et continuent de caresser la frontière entre le réel, le surréalisme et le transhumanisme.
Au final, les défilés Jacquemus ne finissent pas de détoner et bouleverser les champs des possibles dans l’industrie mondiale de mode, avec une balance entre « tradition et modernité » selon l’adage du dictionnaire Tiktok.
Lunaticharlie.
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